L'Éducation positive

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Quel parent ne s’est déjà pas emporté devant les bêtises grandissantes de leur enfant ? Entre les grondements, les fessées, les cris et hurlements, la plupart des parents souffrent silencieusement d’une certaine inquiétude. Certains se culpabilisent de parfois dépasser les bornes et d’en venir aux moqueries et à l’humiliation, d’autres de ne pas être assez autoritaires et de céder rapidement aux caprices enfantines. L’éducation traditionnelle, pourtant jugée efficace pendant une certaine période, s’efface petit à petit pour laisser place à une nouvelle forme d’éducation : l’éducation positive. Votée en tant que projet de loi en juillet 2019, l’éducation bienveillante bouleverse le système tout en apportant des changements bénéfiques dans la relation parent/enfant et éducateur/enfant.

Petit rappel sur le modèle éducatif traditionnel

L’éducation traditionnelle est celle que nous avons hérité de nos grands-parents voire de nos arrières grands-parents. Elle est essentiellement caractérisée par des pratiques punitives et correctives. Ces pratiques, aujourd’hui qualifiées de « violences éducatives ordinaires » (VEO) se manifestent au travers de gestes et paroles banales que les parents appliquent au quotidien pour corriger leurs enfants. Des fessées aux gifles, en passant par les menaces et les agressions verbales, ces violences ordinaires prennent différentes formes. Les parents pensent souvent réussir à forger le caractère de leurs enfants au travers de ces pratiques, mais les conséquences sont souvent catastrophiques sur l’enfant. Selon les neuroscientifiques, les enfants qui ont grandi dans un environnement violent sont plus susceptibles de vivre une adolescence mouvementée voire instable.

Comment définir l’éducation bienveillante ?

Contrairement au système éducatif ordinaire, l’éducation bienveillante est essentiellement basée sur l’empathie et le respect de l’enfant. Il s’agit d’adopter une attitude bienveillante vis-à-vis de l’enfant dans toute son éducation. Dans cette méthode, l’enfant est considéré comme un être humain à part entière, pourvu d’un sentiment, animé par des émotions diversifiées et surtout libre d’exprimer ses souhaits. De la même façon que le parent prend en compte les besoins spécifiques de chaque membre de la famille, il doit également prendre en compte les besoins de son enfant.

Privilégier la coopération aux injonctions

Selon Nicolas Marquis, professeur de sociologie à l’université Saint-Louis de Bruxelles, la société d’aujourd’hui joue un rôle très important dans l’évolution de l’autorité parentale. Selon ce professeur, il est désormais révolu ce temps où on considérait les enfants comme « des enfants ». La société actuelle les a relevé au statut d’adulte en devenir, libre d’exprimer leur besoin au quotidien. Après avoir été longtemps recalés pour leur jeune âge, les enfants sont aujourd’hui invités à participer quotidiennement à leur éducation, au travers d’échanges constructifs. L’éducation bienveillante repose d’ailleurs sur ce principe pour remplacer les injonctions par de la coopération, les punitions par la réparation des bêtises, les hurlements par un dialogue, les conflits par une explication. Bref, la bienveillance privilégie la communication à la violence afin de réduire le fossé creusé par le pouvoir parental sur l’enfant.

Quid de la loi « anti-fessée » en France

Il fût un temps où les corrections physiques faisaient partie des méthodes les plus appréciées pour ramener un enfant sur le droit chemin. Mais ce temps est désormais révolu. Aujourd’hui, grâce à l’interpellation de nombreuses associations et organismes qui luttent pour le droit de l’enfant, le gouvernement français met fin aux violences éducatives traditionnelles. 

Le 10 juillet 2019, la France adopte une loi « anti-fessée » interdisant tout simplement les gestes ordinaires caractérisés par la violence physique sur l’enfant. Depuis l’adoption de cette loi au Sénat, la France figure au 56ème rang des pays de l’Union Européenne à avoir remis en question la problématique des châtiments corporels. Pour l’heure, les mesures d’accompagnement envers l’interdiction des violences éducatives sur l’enfant tardent à voir le jour.

 Cette loi demeure une simple loi jusqu’à ce que les professionnels du milieu éducatif trouvent une manière de l’appliquer au quotidien. Bon nombre de parents s’interrogent sur l’avenir de l’autorité parentale sans les « fessées ». Mais d’ores et déjà, les spécialistes sont nombreux à tenter une introduction de l’éducation bienveillante auprès des parents, au travers d’une méthode basée sur l’interaction parent/enfant.

Comment appliquer le principe de l’éducation bienveillante au quotidien ?

Parents et enfants sont inévitablement confrontés à des situations conflictuelles. L’éducation bienveillante ne cherche pas à éviter ces conflits. Mais elle privilégie la recherche de solutions à la place des sanctions immédiates. Le principe consiste à trouver une solution qui satisfait à la fois le parent et l’enfant. Pour cela, il faut un parent à l’écoute et un enfant confiant. En restant calme et positif face aux bêtises de son enfant, le parent évite toute violence et privilégie une confrontation. 

L’idéal, c’est d’impliquer son enfant dans l’établissement des règles à respecter dans la maison. Il s’agit de lui donner la responsabilité d’assurer le bon fonctionnement du quotidien de la famille, de l’inclure dans chaque décision.

Les limites de l’éducation bienveillante

Toute forme d’éducation a une limite et l’éducation bienveillante ne peut échapper à la règle. Beaucoup de parents hésitent à adopter cette nouvelle forme d’éducation pour les risques non négligeables qu’elle présente. Il est connu des parents qui sont trop doux avec leurs enfants de parfois devenir trop laxistes envers eux. Selon certains spécialistes, l’autorité parentale est indispensable car un enfant reste toujours un enfant dans un premier temps, il voit toute restriction comme un obstacle à son épanouissement personnel. Une théorie controversée par d’autres critiques qui affirment que bienveillance ne rime pas forcément avec « lâcher prise ». Il faut reconnaître que certains parents ont du mal à rester cohérents dans leur décision. Dans ces cas, parents bienveillants deviennent tout simplement des parents mous.

Du côté de l’enfant, les risques concernent surtout l’incapacité de faire face aux violences (existantes) à l’avenir. Pour de nombreux spécialistes, éduquer un enfant dans la bienveillance totale peut réduire ses capacités de réagir face à la violence une fois adulte. Certains estiment même que sur le long terme, un enfant élevé selon les principes de bienveillance peut avoir du mal à s’imposer vis-à-vis d’autrui : dans son couple, son milieu professionnel voire sa relation conjugale.

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